autour des "Gaundri" :
hommage à Giuseppe Gaudino et Isabella Sandri
en présence des réalisateurs


Une carte blanche à Monoquini
dans le cadre du festival Cinéréseaux


www.cinereseaux.lautre.net

Téléchargez le programme du festival ici




Samedi 28 septembre 2013
Auditorium Jean-Jacques Bel
Bibliothèque de Bordeaux

Entrée libre

à 14h30


LES CHAMPS BRULANTS


Un film de Catherine Libert et Stefano Canapa
France/Italie, 2010, 16mm, couleur et n&b, vostf, 72 min

Dans la région de Pouzzoles, au Sud de Naples on trouve ce paysage volcanique que Dante a nommé "la bouche de l'enfer". De nos jours, ce n'est pas Giuseppe Gaudino qui, témoin de l'effondrement progressif de sa ville natale, le contredira. Avec Isabella Sandri, ils forment un couple mythique qui se rejoint dans la création d'un cinéma indépendant sans équivalent dans l'Italie contemporaine - un cinéma des ruines, de la survivance, mélange de passion et de colère qui trouve sa motivation au plus profond d'un engagement personnel. Sur un mode libéré des standards documentaires, Catherine Libert et Stefano Canapa, en cinéastes de traverse, ont suivi le couple qui a trouvé, dans l'expérience des confins et de la précarité, le privilège du temps.
Le critique de cinéma Enrico Ghezzi apporte un juste éclairage sur le désir intact de faire des films, qui est ouverture permanente au monde, aux autres et à soi-même.
"Les champs brulants" constitue un magnifique portrait d'artistes et une flamboyante leçon de cinéma.

Catherine Libert - Née à Liège (Belgique) en 1971, a fait ses études en réalisation cinéma à l'INSAS (Bruxelles). Elle entame son parcours un tournant un court-mètrage de fiction ("Dans le noir") dans des conditions classiques de production (lourde équipe, subventions confortables…). Et très vite, elle se rend compte que son cinéma ne se trouve pas à cet endroit. Les films qu'elle réalise ensuite se sont donc inscrits dans une démarche de plus en plus indépendante, poétique et expérimentale. Elle fait ses armes avec la réalisation de deux documentaires "Benjamin, portrait d'un départ" et "Nul ne sait ce que peut un corps", avant d'entamer le tournage de son premier long-métrage de fiction "Un été", tourné en super 8, aujourd'hui en finition et de se lancer dans la réalisation des "Chemins de traverse".

Stefano Canapa est cinéaste. Il explore depuis bientôt une quinzaine d'années les possibilités du cinéma argentique, dans le laboratoire comme lors de la projection, en élargissants sa recherche à des formes vivantes telles que la film-performance ou l'improvisation. Aux cotés des projet personnels (Promenaux, La passione non cambia, Appunti per un film d’amore, Petrolio) il travaille régulièrement à des réalisations collectives.
Installé à Paris depuis 1999, il réalise et développe ses films à L'Abominable, laboratoire cinématographique d’artiste dont il est l’un des responsables. Il a contribué à la création de plusieurs structures de ce type, notamment à Turin (Superottomonamour) et Montevideo (LIC). Depuis 1998 il est membre du GROUPE ZUR – Zone Utopiquement Reconstituée, collectif d'artistes de différents horizons qui travaille au croisement des arts plastiques, du théâtre, de la musique et du cinéma.






à 16h30


PER QUESTI STRETTI MORIRE
Cartografia di una passione

(En ces détroits mourir - Cartographie d'une passion)


Un film de Giuseppe M. Gaudino et Isabella Sandri

Italie, 2010, vidéo, couleur et n&b, vostf, 93 min

Deux garçons, fouillant les archives entreposées dans la réserve d'un petit musée de province, au Chili, exhument les rares images et traces subsistant de l'explorateur cinéaste et photographe Alberto Maria De Agostini (1883-1960).
Parti à vingt-six ans d'un village du Piémont en tant que missionnaire, celui-ci atteignit en 1910 la Patagonie et la Terre de Feu. Il escalada des montagnes, découvrit des fjords et explora des glaciers auxquels il donna les noms. Il cartographia un territoire alors vierge. Face au déchirement provoqué par la disparition des derniers Indiens Ona, Haush, Tehuelche, Yamana, Alacaluf, "sauvages" au vocabulaire riche de plus de 32 000 mots, décimés par la "civilisation des blancs", il entreprit de fixer leur image, leur mode de vie et leur culture sur plaques photographiques et réalisa un film marquant, "Terre Magellaniche". Gaudino et Sandri partent à leur tour sur ses traces, tentant de faire ressurgir sa mémoire dans ce paysage splendide et hanté.

Avec eux, on s'éloigne rapidement du strict cadre documentaire sous le régime duquel semble se présenter d'abord ce film. À l'enchantement des deux acteurs qui, tels des explorateurs dans une grotte de papier, redécouvrent une histoire oubliée car jamais écrite, se mêle la voix rêvée du fantôme dont on évoque le souvenir et l'exceptionnelle destinée. La bouleversante beauté des paysages est l'occasion pour Gaudino et Sandri de poser un rythme, un ton poétique d'une grande douceur. Mais les deux cinéastes sont coutumiers du "bradisisme", des soubresauts telluriques et historiques où s'effondrent les illusions d'une existence pacifique et paisible. Ils ont brisé depuis longtemps les verrous du confort émotionnel pour se confronter à la guerre sans fin qu'est l'histoire de l'humanité.
Aussi, à l'élégie succède l'âpreté de la chute. Cette cartographie d'une passion mêle l'enchantement d'une rencontre avec un espace et un peuple complice, la lente décomposition d'une culture ancestrale face aux seuls intérêts économiques de Blancs lancés dans une chasse à l'Indien - un génocide - jusqu'au tragique enfouissement d'une expérience solitaire et unique sous la poussière d'une réserve d'archives déclassées.
Le missionnaire parvient à échapper à la mystique du Paradis Perdu pour capturer sur des surfaces sensibles celles et ceux qui sont encore présents et vivants devant ses yeux.

Pour conclure, le lyrisme de Gaudino et Sandri s'exprime d'une manière surprenante, par un rêve de fièvre, dans lequel les rebuts de cette aventure sur les terres de Magellan tourbillonnent dans une séquence d'animation en image par image et achèvent le voyage dans un au-delà fantastique et presque naïf.